03/01/2023
Je voudrais raconter les éditions de Minuit telles que je les voyais enfant. Et aussi mon père, Jérôme Lindon, comme je le voyais et l'aimais. Y a-t-il des archives pour ça ? Et comment être une archive de l'enfant que j'ai été ?
Une bête, autrement plus sauvage que les bisons et les loups, franchit le mur de la Wild French Reserve.
Eva-Lou, jeune recrue de la WFR, veut être la première à l'atteindre de sa carabine. Nassim, journaliste écolo, veut faire son portrait avant tout le monde. Mais que veut la bête ?
Regarder passer les bateaux sur le fleuve Douro, au Portugal, se promener dans la nuit de Kyoto, voir filer les poissons sous un petit pont de bois de Takayama, jouer au pachinko à Tokyo, marcher sur les rives d'un lac du Colorado, faire un tour à scooter dans Paris, flâner sur une plage normande, ça vous dirait ? Ah, les voyages que ça permet, la lecture, ah, l'espace idéal que c'est, un roman, où on peut circuler d'un lieu à l'autre, librement.
Au royaume du hasard
je suis le maître du temps
transporte des milliers de coeurs
des millions de battements
Il me suffit de cravater quelques commutateurs
et j'avancerai l'heure de chacun d'entre eux
Je ne sonne pas le tocsin, ni ne détiens de pouvoir divin
je conduis le train
Emmanuelle André - Jacques Aumont - Paul Aymé - Raymond Bellour - Bernard Benoliel - Anne Bertrand - Damien Bertrand - Christa Blümlinger - Jacques Bontemps - Gabriel Bortzmeyer - Nicole Brenez - Érik Bullot - Mathieu Capel - Amadis Chamay - Serge Daney - Pierre Eugène - Jean-Paul Fargier - Harun Farocki - Hélène Frappat - Jean-Michel Frodon - Oliver Fuke - Hervé Gauville - Yervant Gianikian - Matthieu Gounelle - Philippe Grandrieux - Marie Anne Guerin - Ryûsuke Hamaguchi - Shiguéhiko Hasumi - Vinzenz Hediger - Nicolas Helm-Grovas - Radu Jude - Friedrich Kittler - Alexander Kluge - Romain Lefebvre - Mathieu Macheret - Catherine Malabou - Eva Markovits - Kira Mouratova - Laura Mulvey - Raphaël Nieuwjaer - Jacques Rancière - Mark Rappaport - Clément Rauger - Bert Rebhandl - Judith Revault d'Allonnes - Jacques Rivette - Jonathan Rosenbaum - Peter Szendy - Noah Teichner - Antoine Thirion - Marcos Uzal - Amos Vogel - Peter Wollen - Dork Zabunyan - Eugénie Zvonkine.
Harun Farocki, né en 1944 à Neutitschein (aujourd'hui Novíý Jicín en République tchèque), a réalisé des films et des oeuvres audiovisuelles depuis la fin des années 60 et des installations depuis 1995 (soit plus d'une centaine d'oeuvres). De 1962 jusqu'à sa mort en 2014, il a vécu à Berlin, comme cinéaste, essayiste, enseignant et artiste.
Dans son oeuvre critique et rigoureuse, Harun Farocki aimait décortiquer le travail des média, des films et des machines de vision, mais aussi étudier celui des artisans, des ouvriers et du monde commercial. Depuis le milieu des années 1960 jusqu'à sa mort en 2014, tout au long de sa vie de cinéaste, d'essayiste et d'artiste, il a analysé les dispositifs des images photographiques et post-photographiques, leurs régimes d'affection et de signification.
C.B.
Thomas entre dans le parc comme on rentre dans une image et Comme si de couleurs les ondes on teignait Ou si l'air et le vent de couleurs on peignait, et c'est du septième art.
« Oui, la poésie est une solution. C'est le troisième rituel que j'ai réalisé pour sortir de la dépression après le meurtre de mon petit ami Earth. Les rituels pour créer des poèmes provoquent en nous des changements dont nous ne connaissons pas encore l'étendue, et j'avais décidé de trouver les bons ingrédients pour le rituel, et je l'ai fait. Ça a marché. »
CAConrad travaille avec d'anciennes techniques poétiques et rituelles depuis 1975. Jeune poète, CAConrad a vécu à Philadelphie (USA), où nombre de ses proches ont disparu au début de la crise du sida. Dans En attendant de mourir à son tour (2017), il cherche à surmonter le meurtre de son compagnon Earth à travers 18 rituels de poésie (soma)tiques qui activent l'écriture par le corps tout en renouvelant les rapports entre poésie visuelle, prose, narration, activisme et humour.
De 1892 à 1924, près de seize millions d'émigrants en provenance d'Europe sont passés par Ellis Island, un îlot de quelques hectares où avait été aménagé un centre de transit, tout près de la statue de la Liberté, à New York. Parce qu'ils se sentaient directement concernés par ce que fut ce gigantesque exil, Georges Perec et Robert Bober ont dans un film, Récits d'Ellis Island, histoires d'errance et d'espoir, INA - 1979, décrit ce qui restait alors de ce lieu unique, et recueilli les traces de plus en plus rares qui demeurent dans la mémoire de ceux qui, au début du siècle, ont accompli ce voyage sans retour.
Notre livre se compose de trois grandes parties principales. La première restitue, à travers une visite à Ellis Island et à l'aide de textes et de documents, ce que fut la vie quotidienne sur ce que certains appelèrent ' l'île des larmes '. Dans la deuxième, ' Description d'un chemin ', Georges Perec évoque sa relation personnelle avec les thèmes de la dispersion et de l'identité. La troisième, 'Mémoires', reprend les témoignages d'hommes et de femmes qui, enfants, sont passés par Ellis Island et racontent leur attente, leur espoir, leurs rêves, leur insertion dans la vie américaine.
Le film Récits d'Ellis Island de Georges Perec et Robert Bober est édité en DVD par l'Institut National de l'Audiovisuel. Pour plus d'informations, rendez-vous sur le site ina.fr.
Il y a quelque temps déjà, Lise et François sont venus me voir, ils m'ont dit : ' Tu te souviens du journal que tu tenais quand tu avais dix-sept ans ? L'année du confinement et de la disparition de ton ami, toute cette histoire avec cette femme, cette sorcière ? Tu ne voudrais pas le publier ? '
Je n'ai rien répondu, j'ai pris un bout de papier et j'ai dessiné :
[Dessin]
Ça voulait dire, ' Non franchement, je n'ai pas envie de me replonger là-dedans. '
' T'inquiète, a dit François, on s'occupe de tout.
En tant qu'enseignante, j'étais satisfaite.
En tant qu'écrivain, je rechignais pour la forme.
En tant que rien de spécial, je pensais pan dans les dents.
Le chemin vers la lanterne magique, tu l'apprendras en commençant par les aventures de la pellicule dans un laboratoire de cinéma qui transforme les négatifs en positifs tout comme un rêveur de films transmute ses idées en plans. Passant de la songeuse adolescence à cette concrétisation, tu voyages ébloui à travers une autre couche sociale qui ouvre les yeux du petit mâle que tu risquais de rester sans cet apprentissage, autant sur le métier que sur le précieux contact avec les Cariatides. Vers la fin du chemin, quand tout part en eau de boudin, c'est le souvenir de ces métamorphoses qui te tiendra debout jusqu'au bout.
Deux miroirs se faisaient face. L'un s'appelait ' art ', l'autre ' littérature '. Édouard Levé (1965-2007) était placé entre eux, et les désignait alternativement du doigt, en silence. Il produisit une oeuvre double, qu'on crut achevée. Ces Inédits relancent le jeu.
Été 1971. À dix-sept ans, Franz Farkas quitte Tilliers, sa petite ville de France, pour passer un an à Oakland, dans la baie de San Francisco.
Accueilli par une famille très atypique, le jeune Franco-Algérien s'immerge dans la Bay Area et découvre ses communautés, ses mouvements et sa diversité, ses films et sa télévision, sa musique et ses chansons, sa culture et sa langue ainsi qu'une autre manière d'apprendre, d'inventer et de s'épanouir.
Dans l'ombre menaçante de la guerre du Vietnam, il rencontre des féministes radicales, des Black Panthers, des membres de la communauté gaie et lesbienne, des gauchistes poseurs de bombes, des Indiens-Américains récemment chassés d'Alcatraz, des enfants d'immigrants japonais internés pendant la Seconde Guerre mondiale - et tient un double rôle féminin dans le Musical de sa High School !
Et pendant ce temps, dans la France de l'après-de Gaulle...
Racontées en choeur par celles et ceux qui les ont vécues des deux côtés de l'Atlantique, ces histoires d'hier annoncent l'Histoire d'aujourd'hui.
Il ne fallait pas parler de ma voisine, même dans son dos. Il ne fallait pas lui parler non plus. Elle n'avait pas demandé la permission d'être enceinte. D'ailleurs, elle faisait plein de choses sans autorisation. Je crois qu'elle sautait par-dessus le portail, quand elle n'avait pas encore le droit d'avoir une clé. Moi non, mais je me cachais pour écrire, parce que je n'étais pas bien sûre que ce soit permis.
Je regardais le fils de ma voisine, tout de travers dans sa poussette, les orbites pleines de soleil, en me demandant quel interdit l'empêchait de bouger, de voir, d'entendre, de parler, de lever une main pour s'essuyer la bouche. Je regardais sa mère et je l'admirais en cachette. Je l'admirais d'avoir fait ça, un gosse défendu qui bavait et coinçait tout le ciel dans ses yeux. J'avais honte aussi, parce que le pauvre.
J'ai écrit cette histoire sans aucune autorisation, même pas la sienne, même pas celle de sa mère, juste pour dire en retard il est beau ton fils, en traversant la cour avant d'ouvrir le portail.
La mutation de la Russie en un Zombieland toxique est ce qui a rendu la guerre possible. Il s'agit maintenant de comprendre les rouages de cette folie.
Non, non, non et non ! Allez, viens en prison ! On va chanter tous les deux seuls ! Comme des oiseaux en cage ! Et quand tu me demanderas ta bénédiction, je me mettrai à genoux. Pour te demander pardon ? On vivre comma ça. Prier, chanter. Raconter de vieilles histoires et rire aux papillons dorés. On aura tous les potins de la cour par une bande de crétins. On aura de bonnes discussions pour savoir qui perd qui gagne... qui est in ? qui est out ? On prétendra expliquer le mystère des choses. Comme si on était les espions des dieux. On tiendra le coup entre les murs. Même au milieu de cette meute, de toutes ces sectes, de tous ces gangs qui vont et viennent comme la marée sous la lune.
V13 : c'est le nom de code du procès des attentats terroristes qui, le vendredi 13 novembre 2015, ont causé 130 morts au Stade de France, sur des terrasses de l'est parisien, dans la salle de concert du Bataclan.
14 accusés, 1 800 parties civiles, 350 avocats, un dossier haut de 53 mètres : ce procès hors norme a duré neuf mois, de septembre 2021 à juin 2022. Je l'ai suivi, du premier au dernier jour, pour l'hebdomadaire L'Obs.
Expérience éprouvante, souvent bouleversante, fascinante même quand elle était ennuyeuse.
Une traversée.
Car à vrai dire, en cette chaude journée parmi les premières du mois de septembre, il n'y a guère que moi à traîner sans raison dans les parages.
Farah, adolescente, a toujours connu L'Église de la Treizième Heure pour la bonne raison que Lenny, son père, en est le fondateur. Elle vit en communauté dans cette Église millénariste un peu spéciale : féministe, queer, animaliste. On y récite Nerval ou Rimbaud. Lenny rassemble ses ouailles autour de messes poétiques et d'ateliers de déparasitage psychique. La Treizième Heure, c'est aussi l'heure de la révélation, du triomphe des pauvres, des dominés, des humiliés. Les membres de la communauté l'espèrent, angoissés devant les menaces qui pèsent sur la planète : épidémies, guerres, réchauffement climatique... Lenny élève seul sa fille Farah. Hind, son grand amour, l'ayant abandonné à la naissance du bébé.
Prix Médicis
Sandrine souhaite partager sa localisation avec vous.
Un récit autobiographique ? Un roman grammatical ? Un témoignage sur l'ancien Tanger, d'avant 1956 ? Une chronique des années 40 et 50 ? Tout cela à la fois ?... Je n'ai pas pensé à ces catégories en l'écrivant.
Depuis 2006 (Terrasse à la Kasbah), j'ai raconté cette histoire, avec ses anecdotes, ses digressions, ses raccourcis, ses hésitations, ses apories, ses répétitions, ses contradictions, ses retours en arrière... Sans me soucier de savoir où cela mènerait ; mon parcours s'est imposé ainsi au fur et à mesure de l'écriture.
Maintenant que j'ai terminé, je regarde Une Grammaire de Tanger comme une vraie fiction, avec ses personnages et son narrateur, le petit Jule, écolier rétif aux prises avec la grammaire. Mais y a-t-il seulement lieu de différencier fiction et non fiction, puisque, dans un cas comme dans l'autre, ce sont les mêmes mots, les mêmes règles fixes qui sont à l'oeuvre ?