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Bruno Bertheuil
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Difficile de savoir qui furent les premiers à transformer le cabillaud. Sans doute les Vikings, qui allaient le pêcher dans la mer du Nord. Il y a plus d'un millénaire, ils faisaient déjà sécher le cabillaud au soleil et au vent du Nord avant de l'emporter dans leurs expéditions.
Plus tard, bien avant que Jacques Cartier mette les pieds sur ce qui allait devenir le Canada, des pêcheurs venus des côtes basques écumaient les eaux de Terre-Neuve, à la recherche de ces si prolifiques bancs de cabillauds. Ces intrépides pêcheurs séchaient les morues mais, surtout, ils les couvraient de sel pour les ramener au pays. La morue salée était née. À leur suite, les Bretons, les Normands ou les Portugais vont développer leurs propres techniques.
Salé ou séché, parfois les deux à la fois, le cabillaud devient la morue et c'est bien plus qu'un changement de nom qui s'opère : préparé de cette manière, le poisson peut se transporter, se conserver et être consommé très loin des lieux de pêche. C'est ainsi qu'est né l'estofinado dans le Rouergue, à plusieurs centaines de kilomètres du premier rivage, et que les préparations de la morue se sont multipliées, depuis les brandades et l'aïoli de morue des Méridionaux ou les acras des Caraïbes jusqu'aux lutefisks scandinaves ou la morue pilpil des Basques - mais, bien évidemment, c'est au Portugal que la bacalhau fait figure de plat national.
Déguster un plat de morue, ce n'est donc pas simplement savourer un poisson, c'est s'inviter à un long voyage ! -
Élevé depuis l'antiquité égyptienne au moins, le canard a trouvé en France une terre d'élection. Deuxièmes producteurs mondiaux de canards derrière les Chinois, les Français en sont surtout les premiers consommateurs ! C'est dire si nous accordons à ce joyeux palmipède une place de choix. Il suffit de parler de cuisses de canard confit et de magret pour voir les yeux briller et la bouche saliver - sans même évoquer le foie gras dont la présence semble indispensable pour un repas de fête, tant il illustre à la fois le raffinement et un certain art de vivre français.
Pourtant, il n'y a pas que des canards gras dans nos élevages. Il y a en France beaucoup de canards qui ne sont pas gavés, dont le foie reste bien rouge et qui ne demandent (ou presque) qu'à passer à la casserole, en cocotte ou à rôtir tranquillement accompagnés de navets, cerises ou de coings (le fameux canard coing-coing).
Au-delà du canard de Barbarie qui est le plus présent de ces canards non gras, les Français, au fil des temps, ont développé de nombreuses variétés parfois très locales : le canard de Challans, le canard de Rouen, celui de Duclair, etc., dont certaines, en voie de disparition, ne doivent leur survie qu'au travail d'éleveurs passionnés.
Inscrit depuis longtemps dans la gastronomie avec des recettes emblématiques comme le classique canard à l'orange, le prestigieux canard à la presse de la Tour d'Argent ou le canard laqué (morceau de bravoure de la cuisine chinoise), notre palmipède se prête volontiers à l'imagination des gastronomes.
Qu'on se le dise, en cuisine, il n'y a jamais de vilain petit canard !