« Nous ne sommes qu'un, acharné à rendre droit ce
qui ne demande que cela. Le silence additionné à la
quête d'exprimer l'inexprimable. C'est la gouache
qui connaît le chemin, qui se fait plus que je ne la
fais. Elle soulève des mystères, elle dévoile des formes
inédites, elle prend tournure, elle s'impose au point
d'éliminer tout geste supplémentaire. L'écriture n'est
jamais loin du poignet de celle qui peint. Toujours le
noir et le blanc. [...] Avec des pinceaux extrêmement
fi ns, comme des plumes. On n'attend rien, on se
laisse faire, on jubile à la montée d'une apparence,
on voit qu'elles sont solidaires et actives dans la
construction d'un dessin autonome toujours prêt à
accueillir d'autres apparences. » A. C.
« Lorsque j'ai dit à ma grand-mère ce qui se passait,
juste avant mes quatorze ans, une bombe a explosé.
Une déflagration définitive, et pourtant je n'ai pas
tout raconté, juste ce qui s'était passé durant l'année
en cours. Je craignais de lui faire davantage de mal
en énonçant la vérité, en lui révélant que le viol se
répétait depuis sept années.
Sa réaction, dans le lieu clos de la voiture a été
fracassante :
- Tu l'as bien cherché.
En sauvant son coeur de maman qui apprenait le pire
sur la conduite de son fils préféré, elle m'a détruite.
Pour survivre, j'ai passé quarante ans à donner le
change. » C.G.
Jessica Stern, spécialiste reconnue en matière de terrorisme, met en regard pour la première fois son parcours professionnel remarquable avec un parcours personnel soigneusement tu jusque-là, marqué lui aussi, comme elle le dévoile, par la terreur : celle d'un viol subi à l'âge de quinze ans avec sa soeur, et celle de l'héritage d'un trauma générationnel marqué par la Shoah. Plus qu'un témoignage de victime, ce « mémoire » se révèle une enquête passionnante, menée sur plusieurs fronts, dont le résultat est un document original et explosif qui se lit comme un roman policier.
La relation entre celle qui a été frappée par la violence d'une expérience intime traumatique et l'audacieuse professionnelle du terrorisme se tisse au fil de rencontres et d'entretiens déterminants que l'autrice nous fait partager et qui la font progresser dans sa recherche de vérité : avec des proches de son agresseur, dont elle découvre l'identité et apprend qu'il est décédé lors de la réouverture du dossier par la police plus de trente ans après les faits ; avec d'autres victimes de cet homme ; mais aussi avec celles d'un réseau de prêtres pédophiles que « son » violeur aurait sans doute, lui aussi, croisés sur sa route... Son enquête personnelle la conduit également à interroger son propre père, qui se livrera pour la première fois sur son passé de petit garçon juif dans l'Allemagne nazie des années 1930, ainsi que sur la mort de sa première femme, la mère de Jessica, décédée lorsque cette dernière était enfant. L'autrice se rend enfin à la rencontre d'elle-même : Dr. Stern enquête sur Jessica pour repérer avec une précision quasi chirurgicale les failles qui auront marqué sa vie de fille, de femme et de mère. Ce livre, dont chaque page a été arrachée à un silence intérieur, familial, sociétal, culturel et historique, et écrite au prix d'une lutte pied à pied avec le déni, est un livre rare et courageux.
L'amour a fait naufrage. À Paris, sous les toits, la
narratrice grave son calendrier comme Robinson
Crusoé. Elle échafaude aussi d'audacieuses architectures
de petites cuillères ou note des idées pour faire fortune.
Dans son hamac, elle accueille enfants ou amants,
échos du dehors, rêves ou cauchemars du dedans.
Ce livre est son journal doux-amer, tissant réalisme,
poésie et contes cruels. Il s'adresse à celui/celle qui lira
peut-être ("dis, tu es là ?").
Rien ne s'efface, tout s'entrechoque au fi l de quatre
saisons plus une : quinze ans après, en 2020, tout a
changé. Mais le temps joue des coïncidences, et la réalité
avec la fiction.